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L’employeur et son mandataire en droit pénal social

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ENJEU

Lors d’un contrôle social effectué au sein d’une chaine de restaurants, un consultant, sous statut d’indépendant, est arrêté par la police en possession des contrats de travail du personnel de l’entreprise.

Ce dernier est poursuivi devant le Tribunal correctionnel du chef des préventions suivantes :

  • Occupation de travailleurs étrangers sans titre de séjour de plus de 3 mois (article 175§1er du Code pénal social).
  • Absence de vérification du titre de séjour des travailleurs (article 175 §1er du Code pénal social).
  • Absence de déclaration immédiate à l’emploi (DIMONA) (art.181 du Code pénal social).

Il risque d’être condamné à des peines d’amende particulièrement élevées voire à une peine d’emprisonnement.

La notion d’employeur en droit pénal social est plus large que celle d’employeur en droit du travail.

STRATÉGIE

Les préventions pour lesquelles M. X est poursuivi imputent la responsabilité pénale de l’infraction à « l’employeur, le préposé, ou le mandataire », à l’exclusion de toute autre personne. Ces notions ont toutefois des définitions spécifiques en droit pénal social.

L’article 16,3° du Code pénal social définit les employeurs comme « les personnes qui exercent l’autorité sur les travailleurs ».

La notion de mandataire vise quant à elle toute personne physique ou morale chargée par l’employeur d’accomplir un ou plusieurs actes pour son compte et d’assurer pour lui le respect du droit social (C-E Clesse, Droit pénal Social, Bruylant 2013, p. 257 et 261).

Selon la Cour de cassation, il appartient au juge de décider souverainement si le mandataire est doté de l’autorité ou de la compétence nécessaire pour veiller effectivement au respect de la loi (Cass., 3 janvier 2012, Pas., 2012, p. 1).

Aucune responsabilité ne peut cependant être imputée au mandataire s’il n’a agi que sur ordre de son employeur (nous soulignons, C-E Clesse, Droit pénal Social, Bruylant 2013, p. 261).

Dans le but de faire acquitter Monsieur X, il convient donc de démontrer que ce dernier n’est ni un employeur, ni un mandataire disposant du pouvoir d’assurer, pour le compte de l’employeur, le respect de la règlementation sociale.

Il s’avère que le consultant avait fourni ses prestations en tant que simple consultant externe en sécurité alimentaire, fonction qui n’a rien à voir avec celle d’un consultant RH.

Il restait toutefois à expliquer pour quelles raisons ce dernier avait été retrouvé, le jour du contrôle, en possession des contrats de travail de certains membres du personnel d’une part, et se trouvait être l’interlocuteur du secrétariat social de l’entreprise d’autre part.

Après examen des pièces du dossier, il a pu être soutenu que M. X, en sus de sa mission de consultance, avait voulu se rendre utile vis-à-vis des employeurs de l’entreprise en effectuant, pour le compte de ces derniers, diverses tâches administratives incluant des courses de documents entre l’entreprise et le secrétariat social.

Toutefois, dans le cadre de l’accomplissement de ces tâches, ce dernier avait toujours agi sur ordre des véritables employeurs sans jamais poser le moindre acte juridique visant au respect de la législation sociale, ce qui devait l’exonérer de toute responsabilité.

Monsieur X n'était ni un employeur ni un mandataire au sens du droit pénal social, ce qui devait l’exonérer de toute responsabilité.

RÉSULTAT

Après avoir entendu la thèse du consultant, le Tribunal a considéré qu’il n’était pas exclu que celui-ci ait joué le rôle de simple intermédiaire.

Quoiqu’il en soit, le fait qu’il ait été en contact avec le secrétariat social ne suffisait pas à faire de lui un employeur disposant d’une autorité sur les travailleurs ou d’un mandataire disposant du pouvoir d’assurer, pour le compte de l’employeur, le respect de la règlementation sociale.

Le consultant a donc été acquitté au bénéfice du doute.