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Le nouveau régime des clauses abusives dans le code civil

  • Introduction

Depuis le 1er janvier 2023, le livre 5 du nouveau code civil comporte une innovation importante en ce qu’il interdit l’insertion de clauses abusives figurant dans tout contrat (art. 5.52 du code civil). De telles clauses étaient déjà interdites avant l’entrée en vigueur de ce nouveau régime.

Toutefois, la nouvelle règle se distingue des règles existantes à plusieurs titres.

  • Quelles sont les clauses abusives concernées par ce nouveau régime ?

Les clauses visées par ce nouveau dispositif sont celles :

  1. Qui ne sont pas négociables et
  2. Qui créent un déséquilibre manifeste entre les droits de chaque partie au contrat.

À titre d’exemples, seront considérées abusives les clauses non négociables (i) prévoyant des montants de dommages et intérêts fortement supérieurs à ceux nécessaires pour couvrir le dommage prévisible, ou (ii) imposant à l’acquéreur un délai déraisonnablement court pour notifier les défauts d’un produit livré à l’entreprise. L’appréciation du déséquilibre manifeste tient compte de toutes les circonstances qui entourent la conclusion du contrat.

L’objectif de la réglementation est ainsi de protéger la partie faible au contrat qui n’a pas eu la possibilité de négocier les clauses déséquilibrées.

  • Quels sont les changements apportés par le nouveau livre V du code civil?

  1. Premier changement: la qualité des parties

    Une première distinction entre le régime antérieur et la nouvelle réglementation réside dans la nature des parties au contrat.

    Les clauses abusives étaient déjà interdites avant l’entrée en vigueur du nouveau régime.

    Toutefois, l’interdiction se limitait aux contrats conclus, d’une part, entre un professionnel et un consommateur (relations B2C) et, d’autre part, entre deux entreprises (relations B2B). Ces dispositions continuent à s’appliquer de manière prioritaire à la nouvelle réglementation.

    L’article 5.52 du nouveau code civil pose une interdiction générale des clauses abusives dans tous les contrats mais s’applique uniquement dans les cas non visés par les réglementations particulières (lex specialis). En pratique, sont concernées les relations entre consommateurs, ainsi que les contrats auxquels les pouvoirs publics ou les ASBL sont parties.

  2. Second changement: le caractère négociable ou non de la clause

    Une deuxième spécificité apportée par la nouvelle réglementation concerne le caractère négociable ou non des clauses déséquilibrées. Contrairement aux dispositions du Code de droit économique, l’article 5.52 ne s’applique qu’aux clauses non-négociables.

    Ainsi, dans les cas couverts par l’article 5.52, une clause manifestement déséquilibrée ne sera pas considérée comme abusive s’il est possible de prouver qu’elle a été négociée entre les parties au contrat.

  • Quelles sont les conséquences d’une clause abusive figurant dans un contrat ?

Si le caractère abusif de la clause est établi, cette dernière sera « réputée non-écrite ». Cette sanction a pour effet de faire disparaitre la clause.

La disparition de celle-ci n’affectera toutefois pas la validité du contrat qui la contient, lequel continuera à subsister (art. 5.63 du code civil).

  • À partir de quand doit-on appliquer la nouvelle législation ?

Tous les contrats conclus après le 1er janvier 2023 et dont les clauses ne sont pas régies par le Code de droit économique (B2C et B2B) sont soumis à une telle interdiction.

Les contrats ayant été conclus avant cette date resteront soumis à l’ancien code civil.  Toutefois, les parties au contrat peuvent décider de soumettre leur contrat aux dispositions du nouveau code civil.

  •  Conseils

Pour tous les contrats négociés après le 1er janvier 2023 et visés par la nouvelle règlementation, il convient de garder des traces des négociations éventuelles de ces contrats afin d’être en mesure de prouver le caractère négociable de clauses déséquilibrées.

En effet, s’il y a eu possibilité de négociation du contrat, la clause, aussi disproportionnée soit-elle, demeurera valable et ne sera pas considérée comme abusive. Un projet de contrat que l’on envoie par e-mail, invitant son cocontractant à faire ses commentaires préalablement à la signature, pourrait ainsi constituer une preuve du caractère négociable de la clause.

Enfin, pour les clauses qui ne sont pas réellement négociables, il conviendra de veiller à ne pas les rédiger de manière trop déséquilibrée afin d’éviter qu’elles ne soient invalidées par les tribunaux.

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Jonathan TORO

Jonathan TORO exerce en tant qu'avocat au Barreau de Bruxelles depuis 2005. Ayant acquis de nombreuses années d'expérience au sein d'un important cabinet juridique belge, Jonathan accompagne un grand nombre d'entreprises en matière de droit des sociétés, droit commercial, droit du travail et droit de l'immobilier, aussi bien sur le plan national qu'international

Maroua ALEKMA

Maroua ALEKMA a suivi un cursus universitaire pluridisciplinaire fortement axé sur le droit des affaires. Elle est titulaire d'un master en droit international obtenu à l'Université Libre de Bruxelles (ULB) et d'un master en droit de l'Union Européenne délivré par l'Université de Lorraine (Nancy). Maroua a enrichi la communauté S-Team de son expertise et de son enthousiasme.

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