Avant de payer ses salariés, l’employeur avisé veillera à s’assurer de la légalité du mode de paiement des salaires.
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Le principe : le paiement par virement bancaire
L’article 5 § 1er de loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs du 12 avril 1965 précise que le paiement de la rémunération doit, en principe, être effectué par virement bancaire (monnaie scripturale).
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Mais puis-je quand même, dans certains cas, payer mon personnel en cash ?
La rémunération peut être payée en cash uniquement si cette modalité est prévue par :
- Une convention collective de travail conclue au sein d’un organe paritaire ; ou
- Un accord implicite sectoriel ; ou
- Un usage sectoriel.
Les modalités de formalisation et de publicité des accords implicites et des usages sectoriels sont fixées par un arrêté royal du 26 décembre 2015 (Moniteur Belge, 19 janvier 2016).
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Conséquences d’un paiement en cash illégal
L’article 47bis de la loi précitée prévoit que la rémunération est considérée comme n’étant pas payée lorsqu’elle l’a été en violation des modes de paiement prévus par la loi.
Par conséquent, un paiement en cash qui n’est pas justifié par une convention collective de travail, un accord implicite ou un usage au niveau du secteur équivaut à une absence de paiement.
Selon les travaux préparatoires et la jurisprudence majoritaire, l’employeur n’est pas autorisé à apporter la preuve contraire (Exposé des motifs du projet de loi – introduisant le Code pénal social et du projet de loi comportant des dispositions de droit pénal social-, Doc. parl., Ch., 52-166/001 et 1667/001, p.326 et 327 Cass., 14 avril 1986, R.G. n° 7355, Pas., p.989).
En d’autres termes, ce dernier est privé du droit de prouver qu’il a payé son travailleur.
Le salarié pourrait donc vous réclamer deux fois le paiement de son salaire !
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Application dans le secteur Horeca
Dans arrêt du 5 décembre 2022 (Inédit – RG 2021/AB/307), la Cour du travail de Bruxelles a récemment fait application de ce principe dans le secteur Horeca . Une serveuse occupée par un établissement bruxellois bien connu avait assigné son employeur en paiement de sa rémunération.
Ce dernier lui a opposé le fait que sa rémunération avait été payée en cash. À titre de preuve, il produisait des feuilles qui étaient utilisées dans ses établissements et sur lesquels la serveuse avait indiqué son prénom et le montant qu’elle aurait prélevé dans la caisse.
L’employeur n’a toutefois pas été capable de prouver l’existence, dans le secteur Horeca, d’une convention collective de travail, d’un accord implicite ou d’un usage au niveau du secteur autorisant ce mode de paiement de la rémunération.
La Cour du travail de Bruxelles a donc dû confirmer la décision du premier juge qui avait accueilli la demande du travailleur.
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Conclusion
Sous peine de devoir payer deux fois la rémunération de leur personnel, l’on ne conseillera jamais assez les employeurs à respecter les modes de paiement de la rémunération prévus par la loi concernant la protection de la rémunération des travailleurs du 12 avril 1965.
Qui paie mal, paie deux fois !